Cela fait deux semaines que nous sommes de retour. Prise rapidement dans l’engrenage de la routine, du travail, bref, de la vie quotidienne, j’ai de la difficulté à croire qu’il y a deux semaines, j’étais en train de me baigner dans la fabuleuse piscine du Hard Rock Café à Kuta. Ce n’est pas un regret : après cinq semaines loin de chez-nous, nous avions tous hâte de retourner à la maison. Les croissants au beurre de Chez Guillaume me manquaient cruellement. Souvent, lorsque je suis loin de chez moi, ce n’est pas tant mon lit, ma douche, mes vêtements qui me manquent. Ce sont des saveurs. J’ai envie de retrouver la cuisine de tous les jours plus que tout. À peine 48 heures après être débarquée de l’avion, je me mitonnais les petits gâteaux aux carottes, glaçage au fromage à la crème, dont je rêvais depuis deux semaines. Un simple souper au fromage, foie gras torché au porto et pain baguette a fait notre bonheur. Le plaisir que j’éprouve à retrouver mes casseroles me confirme à chaque fois la place importante que tiennent les délices de la table.
Le festin de Babette, de Karen Blixen, est pour moi, jusqu’à présent, l’œuvre qui a le mieux représenté l’importance que peut prendre la nourriture sur notre état d’âme : cette réunion de vieux puritains, unis autour d’un souper extravagant comme ils n’avaient jamais pu imaginer et leur douce transformation à chaque service est extraordinaire. Sous l’effet de la bonne chère, de vieilles brouilles sont enterrées, les esprits pétillent, les visages sourient et chacun se sent inexplicablement plus léger et plus heureux. Comme le dit Babette, ce n’est pas que de la cuisine, c’est véritablement de l’art.
D’ailleurs, je dois souligner que mon désir de retourner à mes fourneaux n’a absolument rien à voir avec la qualité de la cuisine que nous avons mangé à Bali. Tout au long de notre séjour, nous avons divinement bien mangé, ce qui me fait placer Bali pas très loin derrière l’Italie comme destination où la cuisine m’a marquée. Je ne me lassais pas de leur riz au légumes avec un œuf frit et une grosse chip de crevette (nasi goreng) ou de leurs nouilles aux fruits de mer (mie goreng), des poissons fraîchement pêchés et grillés ou du poulet dans la sauce aux arachides (gado-gado). Quand un goût de cuisine occidentale se faisait sentir, il se trouvait toujours un restaurant d’expatrié pour nous calmer le mal du pays. Le Café des Artistes à Ubud où l’on mangeait belge, le Moz.Art de Gili Trawangan et sa délicieuse Sachertorte ou le Porch Café de Sanur et ses hamburgers.
Montréal est une ville exceptionnelle à ce titre : je connais peu d’autres grandes villes dans ce monde où il existe une telle diversité culinaire. Ici, on peut voyager avec nos papilles partout sur la planète. Ce n’est donc pas si mal de rentrer au pays dans ces conditions.